Réforme des retraites : ce n’est pas fini !

Dernière mise à jour le : 18 avril 2023

Réforme des retraites : ce n’est pas fini ! Déclaration commune préalable au CSA Ministériel du 18 avril 2023

Depuis plus de trois mois, à l’occasion de douze journées interprofessionnelles de grèves et de manifestations et d’une multitude d’actions locales et sectorielles, des millions de travailleuses et de travailleurs, de jeunes et de retraité-es se mobilisent pour exprimer le rejet de la réforme des retraites portée par le gouvernement, prévoyant le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans et une accélération de l’augmentation de la durée de cotisation. Ce sont plus de 1,5 million de personnes qui se sont à nouveau mobilisées le 13 avril malgré le début des congés scolaires : c’est un nouveau signe de la crise sociale et démocratique que traverse notre pays.

Vendredi dernier, le Conseil constitutionnel a censuré 6 articles de la loi. Le peu d’ambitions qu’elle contenait sur l’emploi des seniors, le droit à l’information, la pénibilité pour les contractuels de la fonction publique… ont disparu du texte final. Alors qu’il était déjà injuste, le texte de loi reportant l’âge légal de départ en retraite est dorénavant encore plus déséquilibré.

En promulguant la loi immédiatement après l’avis du Conseil, comme une ultime provocation, le président de la République a écarté le seul choix de sagesse et d’apaisement : revenir devant le Parlement pour une nouvelle délibération comme le prévoit l’article 10 de la Constitution sur les bases d’une concertation centrée sur les questions du travail.

Cette réforme est justifiée par le gouvernement sur l’argument du déficit, un argument infondé : le déficit potentiel représente l’épaisseur du trait et nul ne sait vraiment ce que sera l’économie en 2030.

En 2022 par exemple il y a un excédent, alors qu’il était prévu un déficit ! Ce que l’on sait par contre, c’est que le potentiel déséquilibre du dispositif, c’est l’assèchement des cotisations, les multiples exonérations et la précarisation du monde du travail qui l’organisent !

Mais ce que le gouvernement a oublié de nous dire, c’est qu’il a mis en avant cette réforme auprès de l’Europe comme un moyen de rétablir les comptes publics, alors qu’historiquement lorsque les caisses de retraite étaient gérées par les partenaires sociaux, leurs financements étaient équilibrés. Depuis que l’état a confisqué le pouvoir aux salarié-es de gérer cette part de leur salaire, il n’a cessé d’assécher les ressources par des exonérations massives de cotisation. Pire, alors que la gestion des retraites est incluse dans les budgets de la nation, les déficits eux ne sont pas couverts au budget de l’État, ce qui impose des emprunts à des taux prohibitifs pour rembourser la CRDS (contribution pour le remboursement de la dette sociale). Il s’agit bien d’un choix politique de faire payer les salarié-es pour mieux maintenir les avantages fiscaux des grandes entreprises qui pourtant, engrangent des bénéfices records ! Le coût exorbitant du CICE dénoncé par la cour des comptes elle-même est à l’image de la politique de ce gouvernement ; appauvrir les salariés pour enrichir les entreprises !

Il ne s’agit pas d’une question de pédagogie ou de méthode car, comme l’ont bien compris 90 % des salarié.e.s cette réforme va bien les frapper de plein fouet.

De leur côté, les travailleuses et les travailleurs qui ont commencé à travailler tôt, les plus précaires, dont l’espérance de vie est inférieure au reste de la population, et celles et ceux dont la pénibilité des métiers n’est pas ou pas suffisamment reconnue et valorisée seront plus particulièrement impacté-es.

Sans oublier qu’elle aggravera la précarité de celles et ceux n’étant déjà plus en emploi avant leur retraite. Elle impactera plus durement les femmes et renforcera les inégalités entre les femmes et les hommes.

Les agent-es des services et établissements publics de notre pôle ministériel MTECT/MTE/SEM sont, dans ce cadre, pleinement concerné.es. D’autant que :
 l’usure et la fatigue psychique après une carrière chahutée par des réorganisations incessantes, la perte de missions et de sens, la dégradation des conditions de travail ne sont pas reconnues
 la pénibilité et l’exposition de nombre de missions spécifiques ne sont toujours pas ou plus reconnues, ni valorisées à leur juste valeur (exploitation des infrastructures, travail de nuit, travail posté, port d’armes, exposition à l’amiante...)
 Les agent-es bénéficiant du service actif au titre des conditions d’exercice liées à leurs missions seraient quant à eux concerné-es par un maintien en activité encore plus longtemps, soit deux ans supplémentaires

D’ores et déjà, 25 % des salarié-es de la catégorie « ouvriers » n’atteint pas l’âge de la retraite ; Par
ailleurs, 5 % des agent-es du pôle ministériel décèdent avant de partir à la retraite …
Combien demain avec cette réforme ?

Et maintenant ?
Les organisations syndicales ont bien noté que pendant 3 mois le président de la République n’a pas jugé que l’état du pays nécessitait une rencontre pour trouver les voies de sortie de crise.
Sa volonté de tourner la page au plus vite comme si rien de grave ne s’était déroulé relève du mépris et de l’indécence. Les OS n’entreront donc pas dans un agenda politique qui nécessiterait un rendez-vous en urgence et dont l’ordre du jour ne serait pas le retrait de la réforme. Attachées à un dialogue social de qualité, et parce que la colère n’est pas prête de retomber elles décident d’ici le 1er mai de n’accepter aucune réunion avec l’exécutif.
L’intersyndicale soutient les actions et grèves engagées et les initiatives intersyndicales de proximité qui seront décidées localement.
L’intersyndicale appelle l’ensemble des travailleuses et travailleurs, des jeunes et retraitées à faire du 1er mai 2023 une journée de mobilisation exceptionnelle et populaire contre la réforme des retraites et pour la justice sociale. Une telle mobilisation unitaire intersyndicale sur le travail et les retraites est historique dans notre
pays, elle démontre l’importance d’avoir des réponses à la hauteur des enjeux sociaux et environnementaux.
Dans ce contexte social explosif, le dialogue social s’annonce glacial dans la durée avec cet exécutif.
Pour nous, organisations syndicales du pôle ministériel Ecologie-Territoires-Mer il sera totalement gelé au sein du pôle ministériel a minima jusqu’au 1er mai, sans préjuger de la suite qui sera donnée au combat contre cette réforme des retraites.
Au sein des services et des établissements publics, quel qu’en soit le niveau, nous appelons donc l’ensemble de nos représentants à boycotter jusqu’au 1er mai toute instance ou réunion de travail informelle convoquée à l’initiative de l’administration.
Nous ne siégerons pas en conséquence aux 2 réunions prévues cette semaine du Comité Social d’Administration Ministériel, ni aux autres réunions informelles programmées dans les prochaines semaines.
Ne pas siéger à ce 1er CSAM, ne devra pas être pris comme prétexte à engager un dialogue social d’après élections en mode dégradé, sur des bases d’un cadre imposé qui ne garantirait pas les conditions d’un dialogue social de qualité. Vous prendrez vos responsabilités et nous jugerons vos actes.

Cette loi, adoptée dans la brutalité démocratique et en manipulant nos institutions est peut être jugée constitutionnelle ;
Mais le puissant rejet social de cette réforme reste seul légitime et son expression doit se poursuivre.
Pour les droits des agent.e.s public.que.s de notre pôle ministériel, des travailleuses et des travailleurs, pour lutter contre les dérives autoritaires le combat n’est pas fini !!